Étiquette : chronique lecture

Les rêves de nos mères — Carine Pitocchi

Prix du livre romantique 2020 Charleston dont Anne-Gaelle Huon était la présidente du jury.

En 1912, lady Julia Asford, enceinte, vient de perdre son mari tant aimé et est destinée à porter ce lourd deuil dans cette immense demeure tout en donnant la vie. Mais voilà que son passé vient la hanter.

Will Murphy est un gangster irlandais qui règne sur l’East End de Londres avec ses frères et sa sœur. Véritable figure de la pègre, il passe son temps à régler les problèmes d’une manière peu orthodoxe, se faire de l’argent pas très propre et à corrompre la police.

Edna est une ancienne domestique de Julia ayant quitté son poste pour se marier. Sauf qu’entre un mari violent et alcoolique et le manque d’argent, elle doit se battre pour survivre.Un lien invisible unit ces trois personnages dont Edna est le pivot.

Un deuil, un amour de jeunesse oublié, des secrets, des démêlés avec la justice, des coups bas et du sang. Sans oublier une galerie de personnages aussi attachants que hauts en couleur. Dans ce roman, on retrouve l’univers de Peaky Blinders (une série que j’adore !). 

D’ailleurs, parlons-en des personnages : des domestiques au caractère bien trempés qui aiment Lady Julia qui le leur rend bien. Une cousine suffragette affirmée qui conduit sa propre voiture dans un monde codé et qui va au conflit avec une vielle Lady acariâtre qui cache, elle aussi, des secrets et une sensibilité. Des frères gangsters qui ne jurent que par la famille. Les prémisses de la guerre qui frémissent en Angleterre et en Europe.

Ça fuse de tous côtés, des pics lancés à tout va qui nous font souvent sourire. Et les rebondissements donnent un rythme effréné, une course pour la vie qu’elle commence à peine oui qu’elle finit. Les scènes sont terriblement bien décrites, on s’y croirait. Certains sont d’une violence mesurée, mais perceptible au point de nous submerger de colère. Car c’est souvent injuste. On s’attache tant aux personnages.

J’ai beaucoup aimé ce roman. Sa lecture est agréable, on passe un bon moment. C’est un roman bouleversant qui rend hommage à toutes ces femmes qui puisent en elle une force incroyable et qui se sont battues pour la vie, la liberté et leurs choix. 

Une bête au paradis – Cécile Coulon

Émilienne vit au Paradis, une ferme isolée au bout d’un chemin sinueux. Là, elle y élève ses deux petits-enfants, Blanche et Gabriel, tous deux orphelins, depuis la mort de leurs parents. La vie est dure, est rythmée par le travail à la ferme d’où ils tirent leurs uniques ressources. 

Blanche et Gabriel grandissent dans ce monde pas si paradisiaque. Blanche voue un amour infini à son Paradis et n’aspire qu’à une chose, y passer sa meilleure vie.

Quand, à l’adolescence, elle rencontre Alexandre, elle découvre la passion amoureuse. Celle qui dévore et celle qui fait autant de bien que de mal. Tiraillée entre son désir de vivre et mourir au Paradis et son amour pour Alexandre, Blanche choisit les deux.

Sauf que, Alexandre, lui est dévoré par une autre chose que ne comprend pas Blanche : l’ambition. 

Alors, quand il décide partir en ville pour réussir, Blanche voit son existence de déchiqueter en mille morceaux. De la colère à la vengeance, Blanche y basculera d’année en année.

Un roman déchirant. Ce huis clos nous enfonce petit à petit dans les méandres de la folie. Les sentiments exacerbés de Blanche nous entrainent avec elle vers les côtés les plus sombres de l’être humain. On la voit sombrer, on la voit possédée, par sa terre, à tel point qu’elle a arrêté de vivre.

C’est une histoire forte et captivante. Il faut le dire, on adore rentrer dans l’esprit troublé de l’héroïne. Cecile Coulon a su nous faire partager tous les états de Blanche. C’est enivrant et douloureux à la fois. E ce rythme de chapitre effréné contrebalance avec cette folie qui s’insinue peu à peu et qui nous secoue. 

La passion, la haine, la vie se mélangent jusqu’à étayer l’adage qui dit que la vengeance est un plat qui se mange froid. Tout doucement, nous arrivons à une fin inattendue et cruelle. 

Je suis passé par toutes les émotions, souvent négatives, mais en y apposant mes propres expériences. Ce roman détonne et remue. On n’en sort pas indemne. 

À lire !

Surface – Olivier Norek

Noémie Chastain est flic à Paris, capitaine et cheffe de groupe aux STUPS. Lors d’une perquisition, le dealer lui tire dessus en plein visage avec un fusil de chasse. Défigurée et cassée, elle s’apprête à vivre des mois difficiles, mais elle n’a qu’une seule envie : reprendre le boulot. 

Sauf que, personne ne veut plus d’elle, son nouveau visage dérange et renvoie l’image que chaque flic peut se faire tuer du jour au lendemain. Sa hiérarchie l’envoie alors un mois dans l’Aveyron, officiellement pour prendre du recul, officieusement pour fermer un commissariat. Elle se retrouve donc dans une ville tranquille située autour d’un lac. Ici, tout le monde se connait et sa nouvelle brigade lui semble bien pauvre en personnel, seuls 3 policiers et un chef l’entourent. 

Puis, un jour, un fut en plastique contenant un cops remonte soudain à la surface du lac. Et, avec lui, le passé trouble de cette petite ville Aveyronnaise.

Noémie prend l’enquête et va déterrer les lourds secrets de ces habitants.

Ce roman a reçu le Prix de la Maison de la Presse, le Prix Relay, le Prix Babelio-Polar et le Prix de l’Embouchure.

Autant te dire que c’est mérité !

J’ai tout aimé : l’enquête qui s’avère pleine de rebondissements inattendus jusqu’à la dernière page. Plus on avance et plus on découvre des détails sordides. On comprend bien que Olivier Norek est un ancien policier car tout est bien ficelé, bien décrit, et même si on n’est pas dans le milieu, il nous guide à penser comme un flic. Je me suis sentie presque comme un membre de cette brigade. 

Et puis les personnages ! Chaque habitant de cette ville a quelque chose à se reprocher. Ils ont tous englouti le passé et leurs secrets (au propre comme au figuré). Alors quand il ressort, ça part dans tous les sens. Tout le monde sait, mais personne ne parle de ce qu’il s’est passé 25 ans plus tôt.

Quant à Noémie Chastain, elle se lance à corps perdu dans cette enquête comme si c’était sa dernière chance de vivre. Elle est ambivalente, elle a beaucoup de colère et de peurs qui se mélangent, ce qui donne l’effet d’une bombe à retardement prête à exploser. J’ai beaucoup aimé ses échanges avec son psy et les relations qu’elles tissent avec les autres. J’ai bien ressenti les difficultés qu’elle a d’accepter son nouveau visage et de se montrer sous son vrai jour.

Les chapitres sont courts et donnent un rythme effréné. Une lecture hors d’haleine, il a fallu que je me dise à moi-même de penser à respirer ! Un livre qu’on lit presque d’une traite.

Bref, j’ai adoré ce roman, je me suis plongée dedans sans savoir à quoi m’attendre car c’est le premier Norek que je lis. Et je ne suis absolument pas déçu. 

Un très bon polar à dévorer !